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UN SOIR EN COMPAGNIE DE RAYMOND D’ESPOUY (2 juillet 2015)

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Hommage àRaymond d’Espouy.

Ce sont souvent les villes, les grandes agglomérations, qui mettent àl’honneur leurs célébrités, bénéficiant pour cela de subsides et subventions conséquentes.

Dans nos campagnes, dans nos montagnes, dans nos villages, on sait aussi reconnaître le mérite, la valeur, la place que tiennent ou ont tenu certains de nos concitoyens dans le cÅ“ur de ceux qui les ont connus ou côtoyé !

Aujourd’hui, c’est dans le beau village tout en longueur de Monléon-Magnoac, « presque aux pieds des Pyrénées !  » que l’on s’apprête àfêter, commémorer, et surtout honorer, la mémoire de l’enfant du pays... Raymond D’Espouy.

« Papé  » pour ses proches et ses intimes, grande figure, personnage charismatique d’une époque révolue des Pyrénées, qui trouva « la mort blanche  » sur son chemin, dans le vallon de la Frêche lors d’une ascension de l’Aneto, àskis de randonnée.

Comme l’avaient fait avec ferveur en 2005 nos amis Aragonais de Barbaruens et de « Los Montañeros de Aragon  » pour les cinquante ans de sa disparition, ce sont ici des bénévoles passionnés, sous la houlette d’un dynamique trio féminin : Josette, Nicole et Véronique, soutenus par la Mairie en la personne de son Maire Gérard Barthe qui ont élaboré et mis en Å“uvre cette émouvante et sympathique réunion.

Dès notre arrivée, nous sommes reçus par Josette, chaleureuse personne àla robe aux couleurs du printemps, dont on perçoit la passion pour la montagne et son emblématique « Ancien  ». Elle nous guide et nous fait découvrir la magnifique Chapelle des Pénitents, propice àl’évocation d’une telle personnalité. Toujours lieu de culte, ce sont ses murs blancs qui accueillent cette rétrospective de son parcours de vie, et ce, grâce aux élèves de L’école des métiers du Gers, classe DIMA, de Pavie 32 qui sous la houlette de leur professeur Véronique Polvanési ont su mettre en évidence, leurs talents et leur soif de connaissances.
La vie du « Señor D’Espouy  » est décrite en une série de photos et de textes, de sa naissance àsa mort, qui nous permettent de saisir et de comprendre la personnalité attachante de ce grand montagnard… Grand par la taille, mais surtout par sa prestance, sa présence et son charisme, que reflètent avec intensité les photos d’époque en noir et blanc. Grand de par son talent de peintre, de lithographe, de par ses écrits aussi, qui dévoilent une âme chaleureuse àl’écoute de tout et de tous… Grand toujours, par son désir de rassembler les bonnes volontés, des deux versants de la chaîne, pour des amitiés indéfectibles, au-delàde la mort… Grâce soit rendue àtous ces jeunes gens, garçons et filles, pour ce beau travail !!!

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Biographie de Raymond d’Espouy. Photo M. Chambert.

Avant que n’arrivent tous les invités, une autre visite s’impose, dans la sérénité et la moiteur de cette fin de journée. Dominant le chÅ“ur et la salle, c’est par un bel escalier de bois que l’on gagne la mezzanine où sont exposés quelques-uns de ses tableaux, paysages de montagne, natures mortes, tours, dont celle, célèbre de Mayrègne, où il aimait recevoir tous ses amis, souvent espagnols. Guy Bécheau est celui qui dorénavant, aura la lourde tâche de la mettre en valeur et d’entretenir la flamme, nul doute qu’il y parvienne ! Continuant notre visite sentimentale, nous découvrons des portraits de proches et d’amis, dont les visages semblent faire la moue, en jetant un Å“il désabusé sur notre vingt et unième siècle et les changements climatiques notoires de « Notre montagne !  ». Dans un espace réservé, son matériel d’escalade et de randonnée, semble attendre son hypothétique retour, pour une joyeuse « virée  » dans ces Pyrénées qu’il aimait tant. Une partition de sa composition « Mirage d’Amour  » éditée àParis en 1912 àl’âge de 20 ans (valse appelée « valse de Boston  ») met en évidence ses talents de compositeur.

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Mirage d’amour - Raymond d’Espouy. Photo M. Chambert.

Peu àpeu la foule envahit les lieux, les proches sont là, Chantal sa fille qui a tant Å“uvré pour la mémoire de ce père vénéré, Catherine une de ses petites filles qui a pris le relais pour représenter ce Grand-père qu’elle a connu, et dont on lui a tant parlé, et quelques autres membres de la famille. Elles sont suivies par notre Doyen, en la personne de Jean-Victor Parant… 105 ans, bon pied, bon Å“il, l’esprit toujours vif, le sourire aux lèvres, ancien compagnon de Jean Arlaud et de celui pour qui nous sommes tous làaujourd’hui. D’autres personnalités ou amis de la famille sont également présents, comme Xavier Basseras qui fà»t si longtemps président du Club Alpin Français de Toulouse, François Franco de Tarbes, Nanou Saint-Lèbe et Claude Dendaletche, àla plume si alerte pour nous conter la vie de « ceux d’en haut  », Florian Jacqueminet, pyrénéiste émérite et rédacteur en chef de la Revue Pyrénéenne.
Il y a ceux qui n’ont pu faire acte de présence mais dont le simple fait d’évoquer les noms, fait ressurgir des émotions, des souvenirs d’exploits, de lecture, d’amitié : ils nous ont tant apportés et nous apporteront encore sur le plan humain ! Louis et Gilberte Audoubert, Patrice de Bellefon, les jumeaux Pierre et Jean Ravier… et aussi Dominique Dupont que Chantal apprécie tellement… tant d’autres qui me pardonneront de ne pas les citer, que je ne connais que par ouï-dire, mais que j’aurais eu plaisir àsaluer.

La surprise vint de la belle capitale espagnole, Madrid, en la personne de Jorge Delgado petit-fils du grand Julián Delgado Ubeda, et qui a voulu marquer de sa présence l’amitié indéfectible jusqu’àla mort, qu’entretenaient « Papé  » et son Grand-père ; amitié qui a scellé l’amical rapprochement avec nos amis du versant sud, principalement aragonais. Peu après la disparition de leur ami qui avait tant contribué àfaire connaître cette partie de la chaîne, ceux-ci donnèrent son nom àun sommet du massif du Cotiella… mais tous les randonneurs, grimpeurs et amoureux de cette région et ses habitants, connaissent le Pic D’Espouy. Il est de notoriété publique qu’en Aragon, on n’a pas la mémoire courte !

Découvrant dans l’armoire de son Grand-père, de nombreux écrits, des correspondances, des photos, Jorge Delgado voulut savoir, « enquêta  », fit connaissance avec Chantal et Catherine, puis se mit àl’écriture pour produire un magnifique ouvrage « Viajes por el armario del abuelo  » que tout passionné de cette lointaine époque de découvertes, se doit d’acquérir… Nombreux le firent ce soir-là.
Nombreux sont aussi tous ceux qui ont voulu participer àcet événement étalé sur quatre jours ; quelques anciens ont bien connu l’illustre propriétaire de la Tour de Mayrègne comme François Bouzigues, Loulou Soulé ou Lucienne Moyes : leur démarche est plus lente, un peu hésitante, la canne remplace le piolet, mais les souvenirs sont toujours aussi vivaces.

Monsieur le Maire de Monléon-Magnoac, Gérard Barthe, prend le premier la parole pour évoquer avec humour et un brin d’émotion, la vie du concitoyen et du montagnard, soulignant au passage le travail accompli par tous pour faire de cette journée une fête inoubliable. Catherine émue, fit part de sa joie de voir une telle assistance autour de Chantal et d’elle-même. Elle passa ensuite le micro àJorge Delgado, surpris que la « mémoire collective  » soit aussi présente, soixante ans plus tard.

D’autres prirent tour àtour la parole, dont Claude Capdecomme, passionné et très ému de raconter tout ce que lui avait apporté sa rencontre avec Chantal, dix ans auparavant, et son besoin d’aller souvent en montagne marcher « sur les traces de l’Ancien !  ».

Profitant d’un souffle de vent bienvenu en cette période caniculaire, et de la perte de quelques degrés, tous se retrouvèrent ensuite àl’ombre d’arbres vénérables sous le couvert desquels, des tables installées reçurent de grands plats garnis de mets délicieux, préparés avec soin par l’épicerie du village. Ces moments sont propices àla convivialité et peu àpeu, les langues se délièrent et chacun entreprit de faire plus ample connaissance avec ses voisins, évoquer des souvenirs communs, des anecdotes gardées longtemps dans le secret des mémoires, le tout ponctué par les chants d’un talentueux quatuor.

Notre doyen, Jean-Victor Parant, qui fà»t souvent surpris àfredonner ces chants, venus parfois de la nuit des temps et qui ont encore de beaux jours devant eux, ne put s’empêcher parfois, de battre la mesure !

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Jean-Victor Parant, 104 ans, doyen des pyrénéistes. Photo M. Chambert.

Magnifique journée, merveilleuse soirée avec ce mélange de générations. Dans un dernier éclat, un ultime soupir, le soleil disparut àl’horizon, la nuit s’imposa tout doucement sur la chapelle des Pénitents et son vieux cimetière où dorment de leur dernier sommeil Anne d’Espouy son épouse et Philippe son fils.

Pour tous ceux qui ne se résignent pas àclôturer si précocement cette soirée, le beau film de notre ami Guy Fournié, réalisateur de talent et ami de la famille, va nous entraîner dans le sillage de notre hôte, le mettre en lumière, faire découvrir le personnage grandiose empreint d’humanité, l’homme tout simplement ! Comme lui, d’autres auront su mettre en avant la beauté de la montagne, ses difficultés et ses joies, ses personnages surtout ! L’Agenais René DREUIL admiratif de Raymond D’Espouy, a mis en scène dans un très beau film en costumes d’époque le Comte Henry Russell Killough, figure incontournable du dix neuvième siècle. Comme Guy, il continue dans le sillon qu’ils ont tracé, pour nous conter des histoires de vies, peu ordinaires, avec souvent la montagne dans le premier rôle.

Après cette séance inoubliable, chacun regagne son logis, espérant encore de belles soirées comme celle-ci, de belles rencontres aussi ! Nous ne pouvons quitter ces lieux, sans avoir une dernière pensée pour « Papé  » et ses amis disparus.

C’était un soir avec Raymond D’Espouy, àMonléon-Magnoac.

Michel Chambert, CAF d’Agen.

Me souvenant de mes longs monologues nocturnes en sa compagnie, dans le petit cimetière de Mayrègne, où il dort depuis si longtemps déjà !






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