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ROBERT FLEMATTI, UN PYRÉNÉEN AUX ALPES - N° 80 de 1969

Après une brillante carrière à l’école nationale de ski et d’alpinisme de Chamonix, il est revenu dans les Pyrénées de sa jeunesse, à Arrens plus précisément, où Pierre Marie Cortella l’a rencontré.
Il lui a parlé de sa vie à Arrens, à Chamonix, et il nous raconte ses courses dans les Pyrénées en compagnie de René Desmaison et de Lucien Carcassès (Pyrénées numéro 229).


Mais en 1969 déjà, à l’orée de sa carrière, Robert Flematti avait accordé quelques lignes à notre revue (« Pyrénées » numéro 80) ; interrogé alors par Raymond Ritter, comme d’autres montagnards, sur ses moments les plus dramatiques vécus en montagne, il avait choisi de parler de son ascension hivernale du linceul (face nord des grandes Jorasses) en 1968 en compagnie de René Desmaison :
« Après douze jours et douze nuits (si l’on veut bien appeler ça des nuits !), le ventre vide depuis deux ou trois jours, et où l’on se régale à croquer à pleines dents une plaquette de beurre gelée à – 30°, où la peur se colle à la peau et devient l’amie intime des grands moments, où l’on ne sait plus trop ni pourquoi ni comment, car les questions deviennent inutiles, et pourtant, chose étrange, il y a un peu de rêve encore.
Pour moi, par exemple, je savais qu’il y avait énormément de choses à faire et à voir, et je me promettais, une fois dans la vallée, de me promener, de me promener.
Puis il y avait quelques moments de grand vide …
Ce fut long pour atteindre l’arête des hirondelles, nous arrivâmes à quelques mètres puis … ce vent violent, cette tornade, folie des éléments ; souffle et jambes coupées, accrochés à la paroi, telles deux petites mouches, nous ne savions comment faire pour nous abriter. Il fallait à tout prix installer la tente ; que de gestes et d’efforts en vain, cela était impossible et pourtant il le fallait.
Toute ma vie, je me souviendrai de cet instant. Les cordes se soulevaient, tourbillonnaient, s’entremêlaient. La tempête se ruait sur nous dans toute sa violence. Il y avait quelque chose de l’enfer. Ce fut, je l’avoue sans honte aucune, le moment où ma peur fut la plus grande.
Ce fut quelque chose que d’arriver dans des conditions inhumaines au bout de l’objectif, au prix d’efforts inouïs, avec la fatigue, la faim, le froid et cet espoir mêlé au désespoir, pour y trouver cette tempête qui voulait nous arracher notre chance de réussite et peut-être encore plus : notre vie.
Mais le linceul ne nous a pas gardés … »






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