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UNE TRAVERSÉE DES PYRÉNÉES EXCEPTIONNELLE
POUR ELOI CALLADO
- Eloi Callado (à droite) au refuge de Barroude, aoà »t 2013.
(Photo Ch. Abbadie Clerc).
Du 7 aoà »t au 12 octobre 2013, le célèbre grimpeur catalan a parcouru en solitaire et en autonomie, de refuge en refuge et de village en village, 1200 kilomètres entre le cap du Figuier et le cap de Creus. Cette traversée, baptisée TransClassicPyrene, réalisée en hommage au pyrénéisme, lui a permis d’enchainer, et c’est là son originalité et son caractère exceptionnel, 55 voies classiques « d’hier et d’aujourd’hui  » représentant 25.000 mètres d’escalade. Le niveau de difficulté, très variable, allait de II-III (crête Besiberi) à VII (spigolo d’Ansabère) ou même AI (pilier de l’Embarradère à l’Ossau suite à un éboulement récent). Sans les citer toutes, retenons : les trois arêtes du Balaîtous, la face nord du Vignemale, le Tozal del Mallo, l’éperon des Esparrets au Mont Perdu, l’arête des Trois Conseillers au Néouvielle, le grand dièdre du Spijeoles, la voie Ravier au Quayrat, l’arête des Salenques à l’Aneto, les aiguilles de Travessany, les aiguilles d’Amitges, la dent d’Orlu, le dièdre Sala-Bobo au Barbet (Canigou) …
Au journaliste de Desnivel.com qui l’interrogeait sur la pire journée qu’il ait connu, il a répondu ceci : « les moments les plus difficiles que j’ai vécus durant cette traversée l’ont été bien plus pour des raisons de mental que de physique. La majorité des situations tendues ont été dues au fait de grimper en solitaire avec si peu de matériel et une corde si fine.
Une des ascensions qui me laisse le plus mauvais souvenir est la Ravier à l’Arbizon, où la qualité du rocher est détestable et où je finis l’escalade sans corde à partir de la troisième longueur vu que, n’ayant pas de pitons, je ne pouvais pas établir de relais.
Mais, sans aucun doute, les moments les plus difficiles furent le jour où je grimpai la voie Ravier à la Pène Blanque de Troumouse. Ce jour-là il faisait froid et il y avait beaucoup de brouillard, à ne pas voir à cinq mètres, et il m’en couta beaucoup de m’engager dans la paroi. D’abord, parce que sans visibilité je ne la voyais pas ; ensuite, parce que je ne trouvais pas non plus le pied de la voie, et finalement, une fois engagé, la roche était très humide à cause du brouillard. Sur la vire intermédiaire je dus attendre également un bon moment avant de pouvoir identifier la partie supérieure de l’itinéraire. Mais le pire arriva quand, sortant assez tard de la voie, une averse de grêle me laissa complètement trempé et à la limite de l’hypothermie. La descente est relativement simple mais, avec une visibilité nulle et sans GPS il n’y avait pas moyen de trouver le bon chemin, et m’arrêter pour bivouaquer en attendant le lendemain, dans les conditions où je me trouvais, c’était inenvisageable. Aussi je pris la décision, assez risquée, de suivre toute la crête, technique mais plus facile à parcourir, du cirque de Troumouse vers l’est, en passant par les sommets de la Munia, de Serre Mourène et du pic de Troumouse, pour descendre ensuite son arête sud-est (cotée PD) et arriver au port puis au refuge de Barroude. Il me fallait rester constamment en mouvement car j’étais complètement congelé et en descendant, avec le brouillard, le froid et le rocher mouillé, je subis une paire de glissades dangereuses.
De plus, plusieurs fois, je ne vis pas bien par où descendre et je finis par des rappels sans savoir exactement où j’allais atterrir. À la vérité, je me stressais beaucoup car je pensais que je ne serais pas capable de descendre.
Finalement, à la nuit tombante, j’arrivai au port de Barroude et, quand j’aperçus un panneau indicateur du GR, je l’enlaçai et le couvris de baisers comme je n’avais jamais fait auparavant avec aucun panneau.  »
Ajoutons que nous étions présent au refuge ce soir-là quand nous le vîmes entrer, discrètement et sans s’appesantir sur ses mésaventures. Néanmoins, le temps étant toujours bouché le lendemain, il s’octroya une journée de repos bien méritée et nous eà »mes tout le loisir de bavarder avec lui de son périple et de ses prochaines étapes.
G. Raynaud
Lire l’intégralité de l’entretien sur le site de Desnivel
Mis en ligne le lundi 6 janvier 2014.